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Spécial diaspora


dique Patrick Lozès, les partis politiques ne sont pas opposés au développement de ces statistiques. En France, il existe deux types de discrimination : celle qui s’exprime directement en invoquant le refus de louer un logement ou d’attribuer un poste ; celle qualifiée d’indirecte, c’est le plafond de verre : personne ne vous dit rien, mais tout le monde a progressé dans l’entreprise sauf vous. Même silence pour se loger ou quand on envoie des CV, etc. Ces statistiques sont la seule manière de constituer et d’établir la discrimination indirecte comme réalité publiquement accessible. C’est à l’État d’établir le tableau des discriminations en France. Celles-ci ont-elles augmenté depuis ces cinq dernières années ? En l’absence d’outils pertinents, nous n’en savons rien ! ». Quand le CRAN a été créé, en 2005, tous les partis politiques étaient opposés à cette proposition à l’Assemblée natio- nale. En 2007, lors de la présidentielle, la question a été posée et là, le oui l’empor- tait : le PS, le Centre par la voix de son candidat François Bayrou, Dominique Voynet pour les Verts, Marie-Georges Buffet pour le PC. « Cette avancée sur cet outil de vérité


devient marquante puisque le CRAN a réussi à le porter dans le débat public et aujourd’hui 70 % de nos concitoyens y sont favorables, » soutient son président. Le deuxième front, c’est la question


qui porte sur « les brûlures de l’histoire ». Là aussi, la bataille est ardue. Le CRAN


milite pour que les mémoires de l’escla- vage et de la colonisation puissent trouver leur juste place dans les manuels scolaires. Troisième angle de lutte : l’illus-


tration de la diversité dans la société française. Dans les entreprises, dans les médias, les partis politiques, le CRAN interpelle et questionne. « Combien d’élus sont issus de la diversité ou lors de chaque changement ministériel ? Nous nous sommes attachés à ce que cette thématique devienne majeure dans le débat public en étant de plus en plus présente dans les médias. Cela facilite notre action pour que les valeurs de la France soient appliquées sans distinc- tion », explique cet élu.


Un financement assuré à 85% par des fonds privés Le CRAN veut aussi mobiliser les


entreprises, les décideurs économiques et ne veut pas « attendre pour agir que les racistes cessent sagement de l’être ». France Télévisions, M6, TF1, Radio France ont été approchés. Si des contacts ont été pris avec L’Oréal et d’autres, Patrick Lozès se défend de toute forme éventuelle d’ins- trumentalisation : « La crédibilité de notre structure dépend de notre vigilance à s’écar- ter de toute forme de manipulation. Nous refusons de servir de labels à des entreprises qui ne sont par vertueuses. » La question du financement du


En France, il existe deux types de discrimination : celle qui s’exprime directement en invoquant le refus de louer un logement ou d’attribuer un poste ; celle qualifiée d’indirecte, c’est le plafond de verre : personne ne vous dit rien, mais tout le monde progresse dans l’entreprise sauf vous.


80 • NEW AFRICAN • Septembre - Octobre 2011


CRAN est aussi posée : pourvu à 85 % par des fonds privés, ce sont des fonda- tions américaines, anglaises et suisses ainsi que des entreprises françaises qui y contribuent. Pour le reste, ce sont des sub- sides publics. L’autre versant de l’indé-


pendance porte sur les posi- tions politiques du CRAN auquel Bernard Kouchner et Brice Hortefeux, alors respec- tivement ministres des Affaires étrangères et de l’Intérieur, avaient commandé un rapport sur le racisme et le commu- nautarisme en octobre 2009. La remise de ce rapport en mars 2010, n’allait-elle pas mettre le CRAN en porte-à- faux du fait des propos dis- criminatoires tenus par Brice Hortefeux ? « Qu’est-ce qui est important ? interroge Patrick Lozès. C’est d’apporter un changement pour des millions


de personnes victimes de racisme dans leur vie quotidienne. Je n’ai pas le droit d’at- tendre pour agir que ce gouvernement s’en aille. Et le prochain sera-t-il meilleur ? Il n’est pas digne pour la France qu’un pré- sident de la République garde un ministre condamné, en première instance, pour pro- pos racistes. Et si, au final, M. Hortefeux était condamné, alors qu’il était en charge du ministère de l’Immigration, c’est la res- ponsabilité de Nicolas Sarkozy qui serait engagée. »


Parmi les 50 propositions du CRAN,


la création d’un Observatoire natio- nal du racisme, comparable à une tour de contrôle des réactions de rejet et de stigmatisation. « Nous sommes une vigie extrêmement réactive. Nous avons été les premiers à réagir pour condamner sévère- ment les dérapages » rappelle Patrick Lozès. Sur France 2, Jean-Paul Guerlain, le célèbre parfumeur, répondant à Élise Lucet « qu’il avait travaillé toute sa vie comme un nègre » ajoutait : « Je ne sais pas si les Nègres ont toujours travaillé, mais enfin… ». Quant à Florent Pagny, qui s’exprimait sur Chérie FM, il avait décidé d’inscrire ses enfants à l’école à Miami de crainte qu’ils ne parlent « rebeu » (arabe, en verlan). Dans les deux cas, le CRAN, sollicité par de nombreux médias, avait critiqué la passivité des deux journalistes qui n’avaient pas relevé ces paroles into- lérables. Le CRAN propose également des réponses aux difficultés que rencontrent les victimes de viols et d’agressions pour porter plainte. La multiplication des contrôles au faciès n’encourage pas la confiance en la police. Contre ces harcè- lements sans critères objectifs, le CRAN propose d’instaurer l’attestation obliga- toire après chaque contrôle policier, une solution simple et efficace qui a fait ses preuves en Angleterre et en Espagne en pacifiant les relations entre citoyens et agents de la force publique. Alors que durant l’été 2010 les actes


violents se sont multipliés contre les Roms, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale de l’ONU (CERD) a alerté sur « le manque de volonté poli- tique » de la France de mettre un terme aux actes racistes. Le futur plan d’action national de lutte contre le racisme prévu par le Premier ministre, François Fillon, pour 2011, et qui tarde à être mis en oeuvre, répondra-t-il aux questions cru- ciales que pose le rapport du CRAN ?


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