En couverture Tunisie
dans les rouages de l’appareil sécuritaire, de l’admi- nistration publique, des médias et dans les milieux d’affaires. Les importants moyens financiers déployés aujourd’hui par le PDP, alors qu’il peinait, avant le 14-janvier, à payer le loyer de ses bureaux et l’impression de son journal, ont aggravé le cas de son dirigeant aux yeux des Tunisiens. D’autant qu’en appelant sans cesse à tourner la page du passé et à regarder vers l’avenir, et en se montrant discret sur les affaires de corruption et les procès des membres de l’ancien régime, Me Chebbi ne fait rien pour démentir ses détracteurs. Au contraire : en recourant aux pratiques du président déchu et en s’adossant à une partie de sa clientèle, recyclée entre- temps dans la révolution, il conforte les soupçons et suscite des craintes. Né en 1944 à Tunis
d’un père avocat originaire de Tozeur (région oasienne du Sud-Ouest), Ahmed Néjib Chebbi a longtemps été, sous Bourguiba puis sous Ben Ali, l’une des figures marquantes de l’opposition de gauche. Nationaliste arabe converti au communisme, il participe, en 1983, à la fondation du Rassemblement socialiste progressiste (RSP). Ce parti ne sera toutefois
légalisé qu’en 1988, lorsque Me Chebbi esquisse un rapprochement avec le nouvel homme fort du pays, le général Ben Ali, à l’instigation de Kamel Letaïef, éminence grise de ce dernier. Le rapprochement, officiellement opéré pour faire front commun contre les islamistes d’Ennahdha, prend cependant fin en 1991-1992, juste après la disgrâce de Letaïef, chassé du sérail par la seconde épouse de Ben Ali, Leïla Trabelsi. Simple coïncidence ? Sans aucun doute. Néjib Chebbi sera en
tout cas l’un des plus virulents opposants à Ben Ali jusqu’à la chute de ce dernier. Entre-temps, en marge du Sommet mondial de la société de l’information (SMSI) réuni à Tunis en novembre 2005, il fait, avec sept autres personnalités de la société civile tunisienne, une grève de la faim pour protester contre l’absence de libertés dans le pays. La même année, il participe à la fondation du Front du 18-octobre, qui regroupe plusieurs forces de l’opposition, dont les islamistes d’Ennahdha. Dans la foulée, Me Chebbi rencontre, au cours d’un pèlerinage à La Mecque, Rached Ghannouchi, le leader islamiste tunisien. Ce qui lui vaut le sobriquet de « Najibullah ». Ce front contre-nature, rendu
nécessaire par l’opposition à Ben Ali, ne tarde pas à se fissurer. En 2006, le RSP change de dénomination et devient le Parti démocra- tique progressiste (PDP). Me Chebbi cède le secrétariat général à Maya Jribi pour se consacrer à la préparation de l’élection présidentielle d’octobre 2009. En vain, puisqu’un amendement de la loi électorale coupe la route aux opposants au dictateur, dont Me Chebbi. Début 2011, Ben Ali
prend la poudre d’escampette et son régime tombe comme
un château de cartes. Le champ est libre pour le leader du PDP qui, après un court passage par le gouvernement de Mohamed Ghannouchi, où il fut en charge du Développement régional, quitte le gouvernement pour se consacrer à la course au Palais de Carthage. On connaît la suite… Dans les sondages,
Chebbi et le PDP sont souvent crédités de la deuxième place après Ghannouchi et son parti Ennahdha. Qu’en sera-t-il au soir de l’élection ? ●
Moncef Marzouki, l’empêcheur de tourner en rond. Entre « andhef wahed »
(le plus intègre de tous) et « mayji chay » (il ne ressemble à rien), ainsi que le définissent ses compatriotes, Moncef Marzouki présente l’image d’un homme politique qui a tous les atouts pour réussir sans parvenir à convaincre. Loin de le servir, son apparence austère, son caractère rigide et sa réputation d’intransigeance et d’intégrité lui valent une réputation d’empêcheur de tourner en rond, grincheux et ingérable. Car chez lui, l’intellectuel militant, l’écrivain moraliste et l’intraitable défenseur des droits de l’homme prennent souvent le pas sur l’homme politique.
Toujours prêt à
Néjib Chebbi et Maya Jeribi.
6 • NEW AFRICAN • Septembre - Octobre 2011
s’émouvoir, à s’emporter et à dénoncer, le Dr Marzouki n’est pas du genre à composer, à négocier - et encore moins à accepter - un consensus sur le plus petit dénominateur commun. Avec lui, c’est tout ou rien. Ferme sur les principes, inflexible sur les moyens, exigeant
sur les moindres détails, ce n’est pas l’homme que l’on aimerait avoir dans son équipe, et encore moins rencontrer dans l’équipe adverse. On raconte que Ben
Ali, qui a su amadouer les plus rigides des intellectuels tunisiens de son époque, se payant même le luxe d’en débaucher quelques-uns qui l’ont servi avec un zèle jamais démenti (Ahmed Smaoui, Mohamed Charfi, Daly Jazi, Mohamed Moada…), ne s’est jamais pardonné d’avoir échoué à apprivoiser M. Marzouki. C’est que ce docteur en médecine de l’Université de Strasbourg (France), ancien interne des hôpitaux et assistant à la faculté de médecine de Strasbourg, spécialiste en médecine interne, neurologie et santé publique, était intraitable. Pas du genre à se laisser berner par un dictateur dont il a rapidement débusqué les velléités autoritaires. Ce natif de Grombalia
(40 km au sud de Tunis) en 1945, devenu professeur en
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