en eau potable se fait donc à pied ou à dos d’âne, sur des chemins difficiles, en portant de lourdes charges. Un toit pour tous est la première
association humanitaire à s’intéresser à ce village. Avec l’aide de quelques hommes de Mashreq Shams et des bénévoles venus de tout le pays, ont été entreprises la construction d’un dispen- saire et d’un espace religieux, la réno- vation de la maison du sage du village et de la citerne d’eau située à l’entrée du village. « Nous avons souhaité nous rapprocher des habitants afin de mieux connaître leurs besoins. Et c’est également plus simple de gérer les chantiers en étant sur place », explique Ali Ben Yahia. Avant d’entreprendre les différents
chantiers, les bénévoles ont dû gagner la confiance des habitants. « Lorsqu’on arrive dans un village comme celui-ci, où tout le monde se connaît et qu’un climat de méfiance s’est installé depuis la révolution, il faut s’armer de patience pour gagner la confiance des habitants », poursuit Ben Yahia. En cette période de campagne électorale, il est difficile de convaincre les villageois qu’aucun intérêt politique ne motive l’activité de l’association. Car depuis que Mashreq Shams existe, personne ne s’est jamais intéressé à ses habitants qui vivent dans la pauvreté depuis des générations. « Ici, nous vivons comme nous le pou-
vons, avec la bénédiction de Dieu. Sur- vivre, c’est sans doute ce qu’on a de mieux à faire », témoigne le sage du village, assis à l’ombre de son olivier, sans même un soupçon de révolte dans la voix. Vêtu d’une djellaba et portant un turban blanc, l’octogénaire à la peau basanée et
profondément ridée laisse ainsi entrevoir la pauvreté dans laquelle il vit depuis toujours. « C’est notre destin », commente Moustapha, assis sur une chaise devant sa maison, entouré de sa femme, sa fille et ses petits-enfants. Il est paralysé du côté gauche, suite à une attaque céré- brale. « La réalité est bien plus noire que vous n’osez l’imaginer, confie-t-il, mes fils ne trouvent pas de travail, je n’ai pas les moyens d’acheter mes médicaments, et l’eau que nous buvons est contaminée ». Des habitants désespérés par cette vie enclavée, à l’image d’une partie de la Tunisie du Centre, du Nord et du Sud.
Le taux de chômage frôle 100 % Aujourd’hui, l’association essaie d’aider les habitants du village à retrou- ver une certaine dignité. Ici, à l’excep- tion du directeur de l’école et de quatre instituteurs, personne n’a un travail stable. Le taux de chômage frôle donc 100 %. Beaucoup d’habitants vivent de la contrebande, la frontière algérienne n’étant située qu’à une cinquantaine de kilomètres. Un toit pour tous espère apporter
une dynamique aux villageois en leur proposant du travail. Les projets de réno- vation en cours ont permis de créer 18 emplois saisonniers. Une formation est prochainement prévue pour les femmes du village. Elles sont encore jeunes, mais les
visages sont marqués par les épreuves de la vie. « Je suis malade et je n’ai pas de quoi assurer l’avenir de mes enfants », confie Saïda, les larmes aux yeux. Pour nourrir sa famille, elle a travaillé comme femme de ménage en ville, une activité qu’elle
ne peut plus poursuivre. « Je survis en vendant un mouton trois ou quatre fois par an. Des moutons qui appartiennent à mon frère », dit-elle d’une voix trem- blante. Cette jeune femme a perdu son époux et ses parents. Les habitants bénéficient d’un accès
aux soins limité, les deux infirmiers ne disposant pas de matériel médical adapté. La mise en place d’un dispensaire est donc aussi urgente qu’indispensable. Quand on est malade à Mashreq Shams, on doit par- courir au minimum 30 km pour se faire soigner. « Je dois aller à Tunis tous les mois- pour voir mon cardiologue. C’est loin, et le transport me coûte cher », raconte Ourida, 43 ans. Les hôpitaux de la région souffrent du manque du personnel, d’équipement et de médicaments. Certains des villageois n’ont d’autre choix que de renoncer à être soignés. Les enfants représentent 70 % de la population du village. L’école les accueille jusqu’à 15 ans, Passé cet âge, la plupart est privée
d’éducation. Seules les familles les plus aisées peuvent envoyer leurs enfants étudier en ville. Le collège étant situé à environ 20 kilomètres, les enfants sont internes et ne rentrent chez eux que le week-end. Au village, ils n’ont aucune activité pour s’occuper, l’association a donc décidé de construire une aire de jeu et de proposer des ateliers aux plus âgés. Les villages comme Mashreq Shams
sont encore nombreux en Tunisie. Quelques associations font leur possible pour améliorer les conditions de vie des habitants. Quant aux hommes poli- tiques, trop occupés par leur campagne électorale, ils choisissent, pour la plupart, d’ignorer cette autre réalité tunisienne. n
Septembre - Octobre 2011 • NEW AFRICAN • 15
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