This page contains a Flash digital edition of a book.
Denis Taurel Le Petit Nicolas chez les Soviets


plus exactement dans cette demi Moldavie à l’est de la rivière Prut, que l’on nomme aujourd’hui République moldave, qui s’appelait hier 10eme république socialiste soviétique, et avant-hier Bessarabie. Il convient de distinguer ce pays de sa jumelle, la région roumaine de Moldavie. Pour inciter le lecteur français à regarder une carte, précisons que la capitale de la république dont nous parlons ici est Chisinau (Kichinev en russe). L’enfant s’exprime en roumain mais il est soumis directement à l’endoc- trinement communiste soviétique. Il raconte avec candeur, sa vie, ses joies, ses désarrois, dans une campagne isolée, aux tréfonds de ce minuscule satellite de la grande Russie. Il va à l’école et, pareil à un Petit Nicolas (1) rural et communiste, son monde est fait de leçons non sues, de bousculades dans les couloirs, de baffes et de coups de pieds dans la cour de récré. Sasha semble quelque peu livré à lui-même, on ne voit guère apparaitre le père que pour tuer le cochon, alors que le jeune garçon doit, lui, tous les jours après l’école, nourrir les animaux. Ses journées débutent par le voyage dans «le car jaune, petit et renflé comme ballon» un autocar qui rebondit merveilleusement sur les dos d’âne (pour peu que l’on réussisse à occuper la banquette du fond), et se poursuivent par l’arrivée à l’école (le car est toujours en retard), sous l’œil mauvais de la maitresse Nadejda Petrovna, pour se terminer par le retour à travers champs et bois où l’on croise gens, bêtes et plantes. Il doit enfin remplir un grand sac de fumeterres plante officinale qui sert aussi de nourriture aux cochons. Dans cette société collectiviste, certains


N


ous sommes en 1980, Vakulovski Alexandr, surnommé Sasha, a neuf ans et vit en Moldavie. Ou


membres du kolkhoze ont des projets personnels: «Nicolas Arsenievici s’acheta une paire de lapins et les plaça dans une cage» Puis il décide d’entreprendre un éle- vage mais de le cacher dans la forêt, son idée: reconstituer un grand terrier artificiel pour que les lapins aillent se nourrir eux- mêmes. Dans la forêt on fait connaissance avec d’autres gens, réels ou imaginaires, il y a un garde forestier un peu braconnier qui devise avec Vladimir Illich Lénine, «Pourquoi les lapins meurent-ils dans les forêts, tués par des éclats capitalistes?», on observe aussi un voisin qui coupe fraudu- leusement du bois et qui cache les grands troncs bien droit pour confectionner une échelle.Sasha s’interroge de manière cocasse: «C’est quoi une échelle pittoresque? Une échelle (...) grande et solide et qui sert à Dieu pour grimper dans le ciel (…). Pendant que Dieu lève son échelle, le pilote soviétique passe dans son avion parmi les nuages (…) parce que rien n’est inaccessible à l’homme soviétique». On le saisit bien: dans la tête de Sasha, les figures tutélaires de Dieu et de Lénine se confondent quelque peu.


langue roumaine «Iepurii nu mor» fait référence aux articles de la presse française


La couverture de l’édition en Quelqu’un félicitait tout le monde


bureaux du kolkhose, les maisons. On est heureux et fier de vivre dans une république socialiste, dans l’union des républiques qui œuvre pour la paix, qui soustrait les hommes aux griffes des capitalistes, qui envoie des soldats pour aider les progressistes d’Af- ghanistan et guide l’humanité sur la voie du progrès scientifique avec Youri Gagarine. Les fêtes patriotiques sont l’occasion de défilés où l’on agite des ballons de baudruche, où l’on scande des slogans anticapitalistes, où l’on brandi des panneaux: «Combattons coude à coude pour la victoire de l’homme soviétique! Que la colombe de la paix ne soit plus écartelée par le corbeau noir du capitalisme!». (…) «Sasha marchait en rang avec Micha Zaborov qui tenait la ficelle de deux ballons ovales. Dans le porte voix, quelqu’un félicitait tout le monde à l’occa- sion de la fête du Grand Octobre et tous les enfants répondaient en lançant des hourras». Mais la grande affaire, dans les défilés, c’est de cacher dans sa poche de petits morceaux de verre et de faire éclater les ballons des filles sans se faire tirer les oreilles par les maitresses. Et puis, Il y a l’éveil à la douceur féminine, lorsque la grande fille qui aide le médecin pour dépister les porteurs de poux l’attire contre elle, lui caresse la tête, et lui murmure à l’oreille pour ne pas l’humilier publiquement: «tu en as! Dis à ta maman qu’elle te les enlève». Et lui, il voudrait rester ainsi la tête contre son tablier blanc, dans son parfum de muguet. Malgré ses notes médiocres et sa tenue


L


es portraits de Lénine, Vladimir Ilitch, sont partout: dans la classe, les rues, les boutiques, les


négligée, Sasha finit par être admis dans la phalange obligatoire des pionniers. Il prête le serment d’allégeance à la patrie, face au drapeau rouge teinté du sang des 20 millions de morts soviétiques qui se sont sacrifiés pour la victoire sur le fascisme. Il reçoit le foulard rouge, coupé dans un coin du dra- peau teinté du sang de ceux qui… Il pense que c’est un beau gâchis de


découper ainsi des drapeaux mais s’avise que les foulards sont sûrement teintés avec de la teinture rouge et non du sang. Couronnement de cette journée de pa-


ssage, il guette la grande fille à la sortie de l’école et il ose lui demander si elle veut bien nouer son foulard tout neuf. «Sasha sentit les mains de Sonia soulever le col de sa chemise et lui passer le foulard autour du cou. Il respira le parfum de la petite bouteille allongée comme un petit épi de maïs et il eu l’impression que son nez avait effleuré son tablier blanc tandis qu’elle se penchait vers lui pour replier le col sur le tissu rouge. (…) Ce soir quand il ôtera son foulard, il le posera sur l’oreiller et l’oreiller sentira aussi la petite bouteille (…).


Un grand succčs littéraire… en France


très couleur locale avec sa barbe noire, dans la tenue typique de l’officiant Orthodoxe


Baştovoi est fort décoratif,


reproduit titres et extraits de journaux et magazines français. C’est que depuis la sortie en France du livre début 2012, aux éditions actes Sud dans la belle traduction de Laure Hinckel, tous les chroniqueurs littéraires français y ont fait allusion. Eblouis par ce premier livre venu de République de Moldavie (au fait, c’est où?), ils se sont pour une fois accordé sur un ton commun : le laudatif. “Un joyau littéraire nous arrive de Moldavie, le premier roman d’une sorte de génie polyvalent”, écrit le Figaro Litté- raire. Dans le Point Sylvain Tesson parle de «culture pope» et note «L’étrangeté hoquetante des pages de Bastovoi (qui) tient au tableau absurde de ces vies passées à ingurgiter les slogans». Le Monde trouve le roman plein de finesse et dit que la manière dont Baştovoi restitue la propagande stali- niste confine à une manière de «poésie de


P


renant en main l’édition roumaine (la troisième) de Iepurii nu mor, on est frappé par la couverture qui


Banat 21 Menuţ


Savatie Baştovoi: Les lapins ne meurent pas


l’absurde», tandis que David Fontaine dans le Canard Enchainé loue ce roman si coloré qui utilise la vision d’un enfant pour faire «une critique joyeuse et radicale du dogme communiste». Les plus pédants ne peuvent s’abstenir de noter la tonalité panthéiste du récit, mais tous sont conquis. La palme de l’enthousiasme revient aux journalistes du magazine catholique La Vie. Non con- tents d’avoir chroniqué le livre, ils ont décidé de se rendre en Moldavie sur les traces de Baştovoi. Imaginez leur excitation! Voici un fils de « marxiste léniniste activiste», qui eut la révélation de sa foi à 17 ans, fut interné pour folie, écrivitUn Valium pour Dieu, reprit des études de philosophie à Timisoara, écrivit Les lapins ne meurent pas, puis, jetant son froc de philosophe aux orties, choisit à 23 ans la vie monacale. C’est la journalisteMa- rie Chaudey qui a suivi le père Baştovoi, d’abord sur les lieux du roman dans le petit village d’Oricova, puis à Chisinau où il est rattaché à la paroisse Saint-Dimitru, baptisant et mariant les paroissiens, enfin, et c’est là que culmine l’extravagant périple, à Chitcani, en Transistrie où il vit en compagnie d’une cinquantaine de frères au sein du monastère Noul Neamþ (fondé jadis par des moines de l’immense monastère deNeamţ en Mol- davie roumaine). Adresse du monastère ? 1 rue Lénine! On y psalmodie l’office en vieux slavon. L’équivalent pour les orthodoxes slaves du latin d’église. Ebullition dans les bénitiers, les lecteurs de La Vie seront aux anges. Quel admirable héraut de la parole divine ils tiennent là.


Maximinian


lar de Informatică al Universităţii Babeş- Bolyai. Este absolvent al Facultăţii de Li- tere, secţia română-etnologie, cu masterat în Etnologie, la Universitatea de Nord Baia Mare. Este director editorial la cotidianul “Răsunetul”, membru al Uniunii Ziariştilor Profesionişti, al Societăţii Scriitorilor Bis- triţeni “Conexiuni”, al Ligii Scriitorilor din România, al Societatăţii Scriitorilor din Bis- triţa-Năsăud, al Cenaclului „George Coş- buc”. Este redactor Radio la “Renaşterea”. Colaborează la: “Realitatea”, “EuRoCom” şi “VIP” – Bucureşti, “Agero” – Stuttgart, “Romanian Tribune” – Chicago, “Revista ilustrată”, “Conexiuni”, “Studii şi cercetări etnoculturale”, “Litera Nordului”, „Vatra ve- che”, „Gând românesc”, “Mişcarea Litera- ră”. Este autorul a zece cărţi: Confesiuni, Ed. Arcade, 2004; Cartea Diuganilor, Ed Karuna, 2006;Generaţia în blugi, Ed. Ka- runa, 2007;Chip de înger, Ed. Karuna 2007; Pe aripa cerului, Ed. Karuna, 2008;Poves- tea Anei, Ed. Lidana, 2009; Solidaritate şi toleranţă, Ed. Mesagerul, 2009; Rădăcini împrumutate, Ed. Karuna, Bistriţa, 2009; Rugăciunea cântată, Ed. Eikon, 2010; Vremea sintagmelor; Ed. Karuna, 2010; Pomul cu litere, Ed. Karuna 2011;Stop re- portofon, Ed. Karuna, 2011;Cartea cu co- perţi de sticlă, Ed. Semănătorul, 2011. Este prezent în antologiile: Scriitori Bistriţeni, Ed. George Coşbuc, tradusă în 7 limbi;Pre- texte, Ed.Eikon, 2008;Punţi, Bistriţa – Giu- la, Ed. Eikon, 2009;Al nouălea cer, Ed. Geor- ge Coşbuc, 2009; Colocviile Ion Căian – Românul dedicate culturii tradiţionale, Ed. Clubul Saeculum, 2009;Pretexte litera- re, Ed. George Coşbuc, 2009. Este cuprins în Dicţionarul culturii şi civilizaţiei popu- lare din Ţara Năsăudului, vol. I,Ed. Napo- ca Star, 2009. Premii literare: Premiul de Excelenţă PROADO, Premiul Casei Româ- neşti din Catalunia – Centrul Cultural Ro- mân Barcelona, Premiul de Excelenţă al Festivalului “Romulus Guga”, Marele Pre- miu al Ligii Scriitorilor Români; a primit Premiul pentru Jurnalism Cultural, pentru Municipiul Bistriţa.


s-a născut la Timişoara, la 10 iulie 1979. A urmat Şcoala Postliceală de In- formatică – Grupul Şco-


Menuţ Maximinian


Răstignit pe cuvinte* Calea Pâinii


langue roumaine «Iepurii nu mor» fait référence aux articles de la presse française


La couverture de l’édition en


l’heure actuelle, surveillé par le pouvoir moldave, il enseigne l’iconographie au sé- minaire de Chisinau, dirige la revue Ekklesia ainsi que les éditions Cathisma à Bucarest. Mais dans quelles circonstances a-t-il aban- donné son émission d’histoire religieuseLes pierres parlent? Il ne le dit pas, mais semble très à l’aise avec les média, n’hésitant pas à inviter des journalistes étrangers pour pro- mouvoir son livre. Icone vivante du mysti- cisme triomphant face au matérialisme, avec sa belle gueule d’apôtre, il pourrait n’être qu’une image, qu’un instrument de propa- gande religieuse. Et cependant, à la lecture de son livre, ce qui saute aux yeux c’est bien son immense talent littéraire, un don de dieu dit-il. Un don travaillé et maitrisé dirons-nous, un don transfiguré qui irradie son livre rythmé comme un poème. L’au- teur parvient à nous captiver de bout en bout, à recréer tout un monde ou se côtoient sous couvert d’innocence, la foi en Lénine, l’amour de la nature, la promesse d’un homme meilleur. Et si ce petit livre se révélait un jour pièce maitresse d’une grande œuvre? Comme une cathédrale byzantine que l’auteur bâtirait sous nos yeux? Le moine moldave n’a peut-être pas fini de nous étonner.


O


n le voit, à 36 ans, ce moine or- thodoxe n’a pas précisément l’étoffe d’un contemplatif. A


éditions Actes Sud/ Jacqueline Chambon 22€. (1) Le Petit Nicolas chronique naïve de la vie


Savatie Baştovoy, Les lapins ne meurent pas,


d’un écolier des années 60, texte de René Goscinny, illustrations de Sempé.


Pe muntele vremurilor, în satul de dincolo, Departe, în inima codrului, Femeia îşi curăţă casa.


Prin colbul fierbinte, Gătată de sărbătoare, Cu năframa de foc şi cămaşa de lapte, Este timp de patru ceasuri Pe calea Pâinii.


Cu desagii pe spatele încovoiat, Coboară la cooperativă. E Ziua pâinii, Sfânta Sâmbătă, Iar Dumnezeu se vede în aluat.


Apoi, cu şapte pite, una pentru fiecare zi, Ia drumul întoarcerii, Tot pe munţi, şi pe munţi, Unde dacii sunt liberi.


Minunea


Peste margini de lumi, În pădurea credinţei, Ochii mari şi miloşi ai Măicuţei Lăcrimează pentru noi.


Icoana minunilor dă viaţă Dă sănătate, bucurie, speranţă, Dă lumii sens, Lumina Minunii.


Fiii lacrimilor sărută Chipul Sfintei. Cu capul spre pământ şi inima spre Cer Îşi pun sufletul în palma Mariei, Mama cu chip blând.


La Nicula veacurile devin veşnicie. Un loc


Drum de o rugăciune Până la calea strămoşilor. Acolo sălbăticiunea este îmblânzită Şi greşelile iertate. Pe obrajii rumeni se vede tihna raiului. În satul cocoţat printre nori se aude liniştea. Stăpânul râde liniştit. În munte stă Lumina, iar în brazdă sfinţenia. Poiana Omului e plină de cântec. Şerpuind printre ţarcuri imense şi căpiţe de fân, Ajungi la Casa Sufletului.


din volumul în pregătire Noduri în haos Banat, anul IX, nr. 8, 2012


*Poezii religioase


Page 1  |  Page 2  |  Page 3  |  Page 4  |  Page 5  |  Page 6  |  Page 7  |  Page 8  |  Page 9  |  Page 10  |  Page 11  |  Page 12  |  Page 13  |  Page 14  |  Page 15  |  Page 16  |  Page 17  |  Page 18  |  Page 19  |  Page 20  |  Page 21  |  Page 22  |  Page 23  |  Page 24